22 février 2006

Garçon/madeleine de Proust.




Comme un coup dans l’estomac, de grandes vagues chaudes m’ont subitement envahies dès que je t’ai aperçu, au hasard de mes divagations webiennes. Ron, son allure, son regard, tout en toi m’a ramené à lui. Mais pour parler de lui, il faut que je revienne à Y.
Depuis tes dernières déclarations, ma vie américaine, mon rêve américain ( ?) s’enfonçait peu à peu dans une quasi solitude dépressive. Tu m’avais de nouveau attaché, emporté. Tu faisais tout pour effacer entre nous les milliers de kilomètres qui nous séparaient. Je ne savais de fait plus vraiment où j’étais : étais-je à Berkeley, étais-je en France avec toi ? Je vivais ma vie comme une parenthèse. Pourtant, tout allait bien pour moi. Je menais ma barque correctement, le travail ne manquait pas, les copains non plus. Et cette vie semi clandestine, marginale comme la vie, dans le climat idéal de Berkeley peut l’être, me convenait. Mais mes journées étaient maintenant ponctuées par cette terrible force de rappel que tu exerçais sur moi. Je travaillais le matin mais trouvais toujours le temps l’après midi pour m’installer au café Durant et t’appeler, annihiler les distances entre nous et pendant quelques heures me retrouver là bas en France à tes cotés. Le téléphone raccroché, je devenais pendant un long moment comme un ET ayant raté sa porte transgalactique, en suspension dans l’éther !
Ainsi doucement mais sûrement tu m’éloignais de Berkeley et de la vie que je pouvais y construire. Pourtant le moment était venu de prendre des décisions. Les affaires allaient bien, notre associé canadien, souhaitait engager les démarches pour régulariser notre situation et ainsi lancer notre entreprise dans la légalité. J’éludais, je le faisais patienter, mais, même si je ne me le disais pas encore, j’avais pris la décision de te retrouver, de revenir vers toi.
Ce matin là, comme à mon habitude, je roulais, dans la fraîcheur matinale, dans les rues sombres de north Oakland, vers le chantier du jour. Cela m’était de plus en plus difficile. Je faisais de plus en plus mécaniquement mes gestes quotidiens, j’avis de plus en plus de mal à quitter « l’éther » entre la France et la Californie. Je planais sec ! Je n’ai pas vu le truck griller le feu rouge, je l’ai pris de plein fouet et ma dodge de 2,5 tonnes a valsé sur elle-même plus de trois fois avant de s’immobiliser à quelques millimètres d’une Cadillac blanche arrêtée devant un bar glauque. J’étais sonné, je n’arrivais plus à sortir de la voiture. Des tas de gens de couleur, sortis d’où je ne sais où, hurlaient autour de la voiture. Il me fallait atterrir reprendre conscience. Alors, tu as ouvert la porte coté passager ; je n’ai vu que ton sourire, tes yeux perçants. Tu m’as aidé à sortir du véhicule. J’ai reçu ton odeur en pleine figure, en un instant, j’ai eu envie, une envie foudroyante de faire l’amour avec toi. Au contact de l’air frais, j’ai commencé à me rendre compte que j’étais dans un environnement plutôt hostile. Le truck n’avait pas attendu, j’avais une station wagon transformée en virgule au milieu de north Oakland, dans une rue d’entrepôts et de bars ouvriers. Ouvriers exclusivement noirs. Je n’avais pas touché, fort heureusement la Cadillac, mais visiblement le propriétaire, un grand gaillard coiffé d’un énorme chapeau de cow boy, hurlait et affirmait le contraire, sa femme à ses cotés hurlait son traumatisme crânien ou je ne sais quoi. Je roulais sans permis et sans assurance. Les flics sont venus, tu as tout arrangé, calmement avec ton désarmant sourire. Tu m’as entièrement pris en charge ; je ne disais rien, rien d’autre que le strict nécessaire : nom adresse, permis ? Oublié à la maison, bla, bla, bla. Une ambulance ? Pas la peine, tu allais m’emmener aux urgences de l’hôpital le plus proche pour que l’on me pose les trois points nécessaires à la blessure de ma main.
Toujours dans le coltard, je t’ai accompagné dans ta Plymouth pourrie. Tu te marrais, très fier de toi, de m’avoir sorti de ce merdier. Pourquoi ? N’avais-tu donc rien d’autre à faire ce matin là que de passer dans un quartier black sauver la vie d’un frenchie paumé ? Toute la matinée c’est écoulée ainsi, moi à l’ouest, toi me baladant à l’hôpital de services en services pour que je puisse être soigné sans débourser un dollar.
Puis, nous nous sommes retrouvés chez toi. Le calme enfin, le silence. Ton odeur partout maintenant, envoûtante. J’avais une envie folle de te prendre dans mes bras ! Tu étais mince, blond, habillé de cuir comme un motard, un motard qui aurait échangé sa moto contre une Plymouth à bout de souffle. Tu portais ton blouson à même le corps, très près du corps, la fermeture éclair laissait apparaître une peau très blanche, une poitrine sèche et imberbe. Je comprenais l’odeur ; c’était celle de ton corps, de ta peau de presque roux mêlée au cuir, un cuir dans lequel tu devais passer tes jours et tes nuits.
Tu nous a préparé du café que nous avons bu en silence, les yeux dans les yeux tu te marrais tandis que je commençais à prendre de plein fouet le contre coup de l’accident. J’ai posé mon café sur le coin de la table et me suis précipité sur toi. Je n’y tenais plus, je t’ai enlacé à l’intérieur de ton cuir, à même la peau et j’ai pleuré, pleuré comme on pleure sur un grand frère. Tu as laissé le flot peu à peu se calmer. Puis, tendrement, tu as posé un baiser sur mes lèvres et tu m’as conduit vers le lit. Là encore, j’étais entièrement entre tes mains. Tu m’as tranquillement déshabillé et proposé de dormir un peu. Je t’ai demandé de rester près de moi, de t’étendre tout contre moi. Tu as simplement enlevé ton blouson et tes bottes et nous sommes restés ainsi, un long moment, toi torse nu, en pantalon de cuir et moi en slip, collés l’un à l’autre. Un grand moment de tendresse partagée.
Quand je me suis éveillé, tu dormais, là tout près de moi. Je pouvais à loisir, détailler ton corps, le grain de ta peau : blanche, je devinais sur tes épaules des taches de rousseur. Ton nombril sur un ventre plat mais pas parfait, sans doute déjà sensible aux multiples bières nocturnes. Pas de poils, juste un léger duvet se faisant plus fourni à l’approche de la ceinture du pantalon. Quelques poils roux cependant dépassaient de sous tes aisselles. Je me suis approché, humé tes bras, ton torse. J’ai laissé mon visage quelques instants juste au dessus de ton nombril à quelques centimètres de la ceinture de ton cuir, posé ma bouche délicatement sur ton nombril. Ta main s’est alors posée sur ma tête, tu étais réveillé, tu m’encourageais. Ton duvet blond caressait ma bouche et déjà l’odeur du cuir, à l’approche de ta ceinture se faisait plus présente. J’ai levé la tête, ton visage dégageait une immense tendresse, une infinie douceur, nous nous sommes embrassés, enlacés. Je n’aurais jamais pu t’ôter le pantalon, tellement il te collait au corps. Assis sur le lit, je te regardais te déshabiller, le regard rivé sur tes mains défaisant chaque bouton, laissant découvrir comme au ralenti, un peu plus de chair blanche sous un duvet de plus en plus fourni. Tu n’avais pas de slip, ta queue était belle, lourde et épaisse, parfaite à décalotter mais comme la plupart des américains tu étais circoncis..
Très vite j’ai collé mon visage sur ton pubis, te respirant à plein nez, très vite, agrippé à tes fesses, j’ai avalé ta queue, tes couilles superbement pendues. Tes fesses, charnues, poilues, une vraie forêt, contrastant avec le reste de ton corps plutôt glabre et imberbe. Que de douceur en toi ! Quel envahissement de tendresse ! Tu rayonnais. Contre coup de l’accident ? Là dans tes bras, sous tes caresses, j’étais comme submergé par une immense émotion, une envie irrépressible de me fondre et de ne faire qu’un avec toi ; Je retenais mes larmes, des larmes de bonheur. Nous avons fait l’amour longuement : infinie tendresse, infinie douceur ; peu de mots. Une longue exploration des corps. Tu m’as pénétré lentement, profondément, longtemps. J’ai joui et j’ai pleuré. Dehors il faisait nuit

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