
Je suis rentré dans ce bar pour mecs situé dans le quartier pour mecs dans la rue des mecs. Un bar aussi triste que les autres ; une déco un peu trash pour faire mecs, une sono à fond pour couvrir le silence assourdissant d’une clientèle parsemée en attente de l’autre. C’était ce que je cherchais : après une semaine tendue, le moral dans les baskets, il s’agissait de se finir copieusement en regardant la vie en face.
Accoudé au bar, un bourbon et une bière pour me rappeler mes nuits new-yorkaises, j’ai pris le même regard blasé que tous les autres clients de ce local.
Tu étais au fond de la salle, appuyé contre le mur. Banal, plutôt petit, un jean bien bas sur les hanches, un tee-shirt noir difforme et trop court laissant apparaître un peu de chair et de poils. Tu ne regardais rien ni personne, tu étais là comme en suspension avec ta bière à la main, presque virtuel. Tu dégageais une force d’appel incroyable, un énorme besoin de tendresse ou en tous cas je l’ai cru et c’est pour cela que je suis venu directement vers toi.
Comme toi, je me suis appuyé contre le mur et, sans te regarder, surtout pas, j’ai dit - je voudrais poser ma main contre ton ventre,

- sortons, chercher l’air frais,
et ta main a pris la mienne pour m’inviter à t’accompagner.
Tu habites rue Tiquetonne ; derrière une petite porte protégée par un digicode, un escalier très raide conduit à ton « chez-toi ». Une pièce vide ou presque. Un lit défait, une fenêtre sans rideaux, quelques revues posées à même le parquet. Une minuscule cuisine-placard et un coin douche.
A peine la porte fermée, tu as enlevé ton tee-shirt et tout en te rendant vers les toilettes, ta main m’a indiqué le minuscule frigo dans la cuisine.
- il y à de la bière au frais si tu veux.
Je t’entendais pisser bruyamment tandis que je me servais un grand verre d’eau. Quand je suis revenu dans la pièce, tu étais sur le lit, en slip.
Je voyais enfin tes yeux, tes yeux bleus de brun qui me fixaient.

Tu m’as fait de la place à tes cotés. Tu n’étais pas mon style de mec : trop petit, trop poilu, un peu dodu. Quand j’ai baissé ton slip, ta bite aussi m’a déçu : sans forme précise, pas très longue ni épaisse ; quelconque. Et pourtant, j’avais envie d’être là. Nous nous sommes caressés, découverts ; très vite nos corps se sont dits qu’ils n’étaient pas là pour l’extase, le sexe. Ni l’un ni l’autre ne bandait d’ailleurs. Par contre nous étions bien, je dis nous car je sentais aux mouvements de ta main, à tes regards que je croisaient de temps en temps que tu étais bien.
Tu as sorti de la poche de ton jean jeté sur le parquet, ton paquet de clopes, tu as commencé à fumer puis à parler.
Tu viens d’une triste ville du nord, tu es serveur dans bar proche de la madeleine, un bar de passage sans âme et peu de clients. La patronne te paie en tickets resto et au black.
La vie dans ta petite ville du nord devenait impossible, des parents alcoolos et un copain, un « meilleur copain » hétéro, bien entendu. Tu as voulu quitter cela, venir à Paris, te fondre dans la foule, le froid de la foule. Tu avais envie de parler et tu parlais ! De tout, de ce copain, de tes doutes et de tes espoirs. Tes aventures, ta sœur, tout y passait. Tu n’avais pas besoin de réponses, tu avais juste besoin d’exister un peu et de te raconter. Ton regard avait changé, il s’illuminait. Tu allumais clope sur clope tandis que d’une main tu continuais de me caresser.
Et puis tu m’as parlé de ta sœur, ta sœur jumelle. Ta sœur tant aimée et qui vit avec une autre fille.
Tu m’as parlé de l’enfant attendu, de l’enfant que tu lui donnes en ayant fait l’amour avec l’amie. L’enfant attendu comme un père attend.
Tes lèvres se sont posées sur les miennes, pour la première fois nous nous sommes embrassés ; longuement. Puis, épuisé de tant de mots, tu as posé ta tête sur ma poitrine, ajusté les draps, éteint la lampe, il était temps de dormir. La lumière de la rue éclairait la pièce encore pleine de tes instants.
Au réveil, collés l’un contre l’autre, ta main enserrait ma queue, c‘était bon. Je ne bougeais pas attendant simplement que toi aussi tu sortes de ton sommeil, voulant rester bandé le plus longtemps possible avec ton corps collé au mien, ta bite contre mon cul. Et puis tu t’es encore plus précisément lové contre moi, ta bite était maintenant bien dure et ta main ne serrait plus mais caressait. Agréablement surpris de la taille de mon engin, tu m’as doucement retourné et engouffré ma queue dans ta bouche. Tu suçais bien. La lumière du jour inondait la pièce tandis que tu t’affairais sur moi et je me laissais conduire tranquillement vers le plaisir. Ah ! Les pipes du matin ! Le corps est encore tout ankylosé du sommeil de la nuit et se laisse doucement réveiller par la douceur de vivre. Bonheur !
J’ai rapidement joui, j’ai joui dans ta bouche, tu en avais envie. Nous sommes restés un long moment enlacés au milieu de ton lit.
Serons-nous amis ?
j'aime bcp cette note...
RépondreSupprimerRécit sur lequel glisse aussi le palimpseste de moments anciens, les miens, ce garçon plutôt petit mais à l'incroyable sex-appeal, et cet autre qui me fit sortir de la discothèque par la main et qui devint presqu'un ami. Celui-là, encore, que je ne cesse d'interroger tellement il a besoin de se dire à un autre, enfin.
RépondreSupprimerDes instants qui me pèsent aujourd'hui par leur disparition.
encore un instant magique, la lecture de ton récit, le récit de cet instant.
RépondreSupprimerOui,très beau et tendre!
SupprimerPierre