13 février 2010

concert


«Jules César» de Häendel à Pleyel

une distribution éblouissante.

Au fond, ce Jules César conduit à des interrogations d'ordre… sociologique. Jouer en pleine semaine à Paris un opéra qui dure quatre heures sans compter l'entracte, en commençant à 20 heures pour sortir à 0 h 40, est-ce tout à fait adapté au rythme de vie d'une grande ville où le dernier métro est à 1 heure du matin et où les horaires de travail sont exigeants ? Quand l'Opéra de Paris monte un Wagner ou Saint François d'Assise, la représentation débute à 18 heures. Cela dit, soyons honnêtes : le public était tellement captivé par ce concert et sa distribution éblouissante qu'il s'est même payé le luxe d'ovationner les artistes à la fin, oubliant la correspondance de toute façon déjà manquée. C'était vraiment une soirée de haut vol, quoique pas tout à fait exempte de reproches. Parmi ceux-ci, le côté fastidieux de la version de concert pour un opera seria, succession d'airs dont on perd la cohérence sans mise en scène. Un peu figés pendant la première partie, les chanteurs se lâchent après minuit. On n'oubliera pas le numéro hilarant de Christophe Dumaux mimant la mort de Ptolémée.Autre motif de frustration parfois : la direction suprêmement élégante de William Christie, avec des Arts Florissants merveilleusement sonnants, manque parfois de nerf et d'ironie. Si elle évite le théâtre, elle se met tout entière au service du chant. Et quel chant !
Perfection, émotion
S'en tenant prudemment au rôle de Cléopâtre pour éviter la tessiture meurtrière du rôle-titre (qu'elle pourrait chanter, on en mettrait la main au feu), la Bartoli fait son festival : à la limite de la minauderie dans ses attitudes, elle donne une leçon de bel canto, la technique souveraine le disputant à l'intelligence des couleurs et du mot.
Mais voilà que Philippe Jaroussky, peut-être stimulé de chanter à côté de son idole, lui volerait presque la vedette : il a été le premier à obliger le public à rompre l'interdiction d'applaudir entre les airs (pour ne pas rallonger la soirée !) tant son chant relève de la perfection du goût et du legato, avec l'émotion en prime. Parfaite complémentarité avec Christophe Dumaux, contre-ténor plus dramatique et corsé, en parfaite adéquation avec son personnage : encore un coup de chapeau, tout comme au jeune Rachid Ben Abdeslam, encore un contre-ténor, encore une sacrée présence. Déception en revanche avec la voix sourde et toujours un peu artificielle de Nathalie Stutzmann, et mission quasi impossible pour un Andreas Scholl éclipsé car le rôle-titre excède les moyens actuels, ce qui ne retire rien à une musicalité toute en délicatesse.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire