Des endroits comme cela

Il y a des endroits comme cela. Des endroits que j'affectionne, Des fois. Des endroits simplement faits pour la rencontre tactile, l'effeuillage rapide, l'explosion partagée. Des endroits où si les regards se croisent parfois, les peaux se frôlent souvent, comme un fait exprès. Ici sous la musique assourdissante souvent, se sont les corps, les hormones qui se parlent, qui échangent. Ici, on se donne, on s'offre en pâture. Ici on prend ce qui se présente, c'est si simple, c'est là rien que pour vous, non, c'est là pour tous. Il suffit de tendre la main et quelques fois même pas. Quelques fois c'est ce sexe bien dur qui frôle votre dos, qui s'attarde entre vos fesses. Un sexe inconnu pressé là par la foule, la cohue. Tout est permis, ici on est ailleurs, pas une autre planète, non. Juste un espace réservé dans une autre dimension. Une sonnette magique, un sas, un instant entre l'extérieur et la bulle. Et puis, la musique est là, que dis-je le beat assourdissant. La chaleur aussi, animale, musquée. Et les corps dénudés ou pas, flashant sous les spots multicolores, brillants, étoilés sous la sueur. Et puis sous le coton d'Egypte, des formes excitées, volontaires. Alors on pénètre dans l'arène, on se fraie quelques fois un passage dans cette masse informe, odoriférante, mouvante. Quelques fois, on s'acharne sur vous, si par mégarde, honte, vous avez pensé un instant garder vos distances sous quelques vêtements. Ne pas communier à cette cérémonie initiatique. Et puis, immanquablement, on viendra chercher ce que vous cachez encore. Des mains inconnues, avides, viendront chercher ce que pourtant vous veniez offrir. Alors là oui vraiment, atome parmi les atomes, vous en serez, vous serez dans le mouvement, prêtre parmi les prêtres, sacrifié parmi les sacrifiés. Avec un peu de chance, vous serez l'élu, celui que tous voudront adorer, tous voudront honorer. Rien alors ne vous sera épargné. Sacrifice de votre corps, don de votre âme à cette étrange communauté. Adulé, pénétré, transpercé. Objet devenu de la concupiscence de tous, objet devenu de votre immense désir. Après, longtemps après. Il faudra bien repasser le sas, retrouver la nuit, la ville. Le monde du dehors. Chaque parcelle de votre corps endolori se souviendra longtemps des honneurs reçus. Et puis là, au fonds, bien au fond, tout tapis en vous, le souvenir de ces multiples dons.