14 décembre 2015

LA CHAMBREE **

Fournaise estivale, un camp militaire pas très loin d’Avignon. Une école du Génie Militaire destinée aux engagés. Quelques appelés mourant d’ennui, juste là pour assurer l’intendance de l’école. Secrétariat, cuisines, logistique,… J’ai passé là une année de ma vie. Comme beaucoup de français, j’ai donné une année pour le service militaire. L’ennui dans la fournaise et le froid de cette région isolée de tout. Je le dis tout de suite, je ne regrette pas, malgré l’ennui, le caractère obligatoire, j’estime toujours que cela a été une expérience enrichissante et je regrette que le service national ait été supprimé. C’était en effet la seule occasion donnée à beaucoup d’être confronté aux autres, aux différences : les riches avec les pauvres, les diplômés avec les illettrés. La campagne avec la ville. Seule période de la vie où finalement le brassage social et culturel est possible. Entre mecs, héteros et pd ensemble aussi, dans une liberté que l’on a peine à croire. Les longues journées passées ensemble de jour comme de nuit amènent forcément une intimité forte entre les conscrits, une intimité partagée et complice. On parle de soi, de ses aventures, de ses craintes, de ses joies. On se donne du courage pour aller aux putes ou pour draguer une conquête. On se compare la queue, on fait des concours de branlette. Dans les moments de profond ennui, les longues soirées d’été où l’on a dîné à 17h et où l’on a rien d’autre à faire qu’attendre la tombée de la nuit et la fraîcheur du soir en buvant bière sur bière et en fumant clope sur clope. Alors il arrive que le geste se fasse plus équivoque, que le regard se charge de désir ; j’ai connu des douches brûlantes où, sous prétexte de bien se laver, on se savonne le corps mutuellement en s’attardant sur les fesses, en s’arrêtant juste au dessus du pubis en évitant de remarquer une queue qui se tend.
J’ai passé une soirée entière avec un légionnaire, superbe et sauvage qui en slip, tout en buvant bière sur bière, insistait lourdement pour que lui « touche ses tatouages », je l’ai longuement caressé, dessin après dessin, sur le dos, sur le torse, sur les bras ; avec mon doigt tout d’abord, puis n’y tenant plus avec mes lèvres à la fin. Tous connaissaient ma sexualité, aucun n’était gay, tous étaient simplement des mecs avec du désir, un besoin de tendresse Je ne parle pas de sexe ; rien ne manque dans une caserne ni la drogue ni le sexe ; comme partout les PD ne manquent pas, et il n’est pas difficile de se faire des amis et plus si affinités. Je ne parle pas de sexe donc mais de chaleur humaine, de connivences, de désirs secrets, de tendresse virile. Cette photo me ramène à la mémoire, ces merveilleuses soirées entre potes de chambrée, où l’on joue aux cartes en fumant et buvant, torses nus, en caleçons ou en slip. Pas de gène entre nous, on se gratte les couilles avant d’abattre son jeu, on pisse dans le lavabo en riant, on se met au lit en s’envoyant le caleçon au visage. Les nuits de grande chaleur, on reste sur les draps en slip ou à poil. On sait les uns et les autres que personne n’est vraiment indifférent à la scène, les sexes légèrement, très légèrement tendus en sont la preuve. On remue d’ailleurs un peu trop, on porte juste un peu trop sa main sur sa queue pour vaincre une hypothétique démangeaison, comme si ça nous grattait. Les poses sont quelque peu lascives. Combien de soirées où il m’a fallu prendre une douche glacée en pleine nuit pour m’endormir, me branler en silence. Combien de fois j’ai été tenté de chiper un calbut, comme celui négligemment posé sur le radiateur afin d’y fourrer mon nez, pour retrouver dans ces effluves ce concentré de mec.





Sur la vidéo, ce sont des militaires américains qui déconnent pour tuer l'ennui... vision très lointaine de mes propres souvenirs, mais on déconnait aussi avec souvent une forte charge sexuelle...

2 commentaires:

  1. Pareil pour moi... sauf un soir, mais je n'ai pas osé aller jusqu'au bout.

    PS: toujours aussi bien écrit... pourquoi tes notes se terminent-elles?

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  2. Anonyme11:53 AM

    Tu as eu beaucoup de chance.Je n'ai pas connu cela. Moi, sous les douches communes, je n'avais qu'une trouille, celle de bander.Je n'ai qu'un souvenir un peu sexy de l'armée. Un de mes copains s'était mal reçu en tombant et souffrait du dos.Il lui fallait des massages. Je ne sais , je me proposais.Il s'étendait sur son lit, torse nu, et moi à califourchon je le massais. Un jour, après la séance, (nous étions seuls dans la chambre), pendant qu'il se rhabillait, il s'est approché de moi et m'a dit, tout à trac, "on ne peut pas dire que tu sois beau, mais tu as un certain charme". Nous nous regardions, tout près l'un de l'autre. Je n'ai pas osé l'embrasser. Je le regrette encore.D'autant qu'il ressemblait à celui qui a bouleversé ma vie et qui est venu bien plus tard.

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