21 août 2017

seul a berkeley


Voilà, le silence absolu recouvrit la maison, le silence et le froid, un froid qui semblait sortir de moi, envahir la pièce. Un froid glacial sur Oakland.
J’ai continué. La dodge le matin parcourait les rues froides de Berkeley et d’Oakland. D’une terrasse de restaurant à l’autre, la vie s’écoulait maintenant sans que je perçoive vraiment le temps passer. Du travail, des paroles échangées avec des clients, des potes ; un cinéma ou un joint, une soirée dans une villa sur les hauts de Berkeley, un jacuzzi plein de mecs speedés à mort admirant la baie en me branlant tranquillement. Aucune pensée d’avenir. Surtout pas penser à demain : rester, partir. Dans les milieux alternatifs de Berkeley, on trouvait des tas de combines pour continuer, longtemps après la période « Baba cool-sinsemilla » Un copain m’avait donné une « clef » pour téléphoner des heures sans payer un cent. Il s’agissait de reconstituer à partir d’un numéro de téléphone pris au hasard sur un annuaire, un n° de carte de crédit téléphonique.
Dorénavant, je passais tous mes après-midi libres dans un petit coffee shop de Durant ave. Je m’installait sur la terrasse à l’air libre, et t’appelais Nous parlions des heures. Toi qui pouvais passer des jours sans prononcer plus de quatre phrases, toi qui ne livrais rien de toi, toi, maintenant me racontais tout. Tes peines, tes angoisses. Tes jours auprès de ta mère et ta solitude dans les rues de notre petite ville de province si loin de SF.
Tu me parlais de moi aussi et de nous. Pour la première fois NOUS existait, prenait forme ailleurs que dans mon esprit. Je te manquais, tu pensais à moi et à notre vie, à la vie que nous pourrions avoir ici à Berkeley.
Après chacun de nos après midi, j’étais mal, je prenais en pleine figure, le soleil de la Californie, la nonchalance et la joie ambiante. Je décidais alors de me détacher de toi, de construire ma vie ici. Je sortais de nouveau dans l’esprit non plus de passer le temps mais de construire, de rencontrer, d’échanger. Je commençais à être heureux, j’espaçais nos appels téléphoniques. Toi bien sûr, le sentis très vite. Ton discours était de plus en plus axé sur le manque de moi, et bientôt sur des projets communs en France. Tu me remettais le grappin dessus, je commençais à y croire, à croire à ce que nous pourrions construire là-bas à Paris. Tu m’éloignais de ma vie californienne, tu détricotais à chacune de nos conversations ce que j’avais tissé auparavant. J’allais de nouveau être à toi.

1 commentaire:

  1. Anonyme1:12 AM

    la deuxième photo me laisse sans mots... mais je viens ici souvent pour lire tes mots...

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