19 octobre 2007

Fin de semaine


fin de semaine ciné at home

the bubble - eytan-fox

Il y a un mot hébreu pour "bulle" (Buah) qui a servi de titre à ce film lorsqu'il est sorti en Israël, en juillet 2006. Il a ensuite été projeté à l'enseigne de
The Bubble au Festival de Toronto, à l'automne suivant. Entre-temps, l'intervention israélienne au Liban avait une nouvelle fois fait éclater cette bulle, enveloppe fragile qui protège la vie quotidienne de la bohème de Tel- Aviv, métropole séculière.

Le cinéaste Eytan Fox compte parmi les résidents de la bulle et son film peint un portrait enjoué de son monde ; au centre d'un écheveau d'intrigues amoureuses, trois colocataires - deux garçons, Noam et Yali, et une fille, Lulu. Tous trois cherchent l'homme de leur vie, se consolant mutuellement de leurs déboires sentimentaux, affirmant leur opposition à la politique du gouvernement en organisant une rave contre l'occupation.

Cette comédie de situation légère serait sans doute ordinaire - même si ses acteurs sont charmants et son rythme enlevé - si Eytan Fox ne portait pas son regard de l'autre côté de la mince paroi qui enferme son gentil trio.

The Bubble commence par une séquence à un barrage de l'armée israélienne à Naplouse. Noam y accomplit à contre-coeur une période de réserve. Au moment d'un de ces incidents qui sont devenus un passage obligé du cinéma palestinien et israélien, Noam remarque un jeune homme palestinien. Une fois revenu à Tel-Aviv, le réserviste voit débarquer chez lui le bel inconnu. Il s'appelle Ashraf et a fui la Cisjordanie où tout - l'occupation, la religion, la famille - se met en travers de sa route d'hédoniste. Il a donc fui, le temps de vivre une histoire d'amour.

Un moment, cette utopie prend corps. Et le film oublie la violence de sa première séquence pour prendre le ton de la comédie évoquée plus haut. C'est une utopie modeste, qui dure quelques jours et ne rencontre pas d'obstacles plus menaçants que le règlement intérieur de l'appartement que partagent Noam, Yali et Lulu.

Eytan Fox met à décrire son milieu, que l'on voit à travers le regard incrédule et parfois émerveillé d'Ashraf, l'enthousiasme d'un propriétaire qui fait faire le tour de son charmant appartement. Il montre Tel-Aviv comme une oasis de plaisir et de raison, dont les jours sont baignés par les accents du rock d'auteur (on entend Keren Ann ou Belle and Sebastian sur la bande-son), rythmés par les productions théâtrales et les expositions. Cette bulle ressemble à toutes celles de l'Occident fortuné et cultivé, l'argent et l'art y coexistent selon les mêmes termes (une séquence assez drôle met aux prises l'acteur Lior Ashkenazi et le rédacteur en chef de la version israélienne du magazine Time out).

Mais The Bubble ne se résume pas à cette carte postale à la fois naïve et ironique. Le vrai propos d'Eytan Fox est d'en expliquer la raison d'être et sa fragilité essentielle. Le couple Noam-Ashraf porte la dimension tragique du film, qui peu à peu étend son ombre. Mettre en scène la façon dont l'histoire, la géographie assurent leur primauté sur le désir et les individus n'est pas chose simple. Eytan Fox recourt à la démonstration, une attitude qui n'a pas très bonne presse.

Mais il est des démonstrations convaincantes, et The Bubble est de celles-là. Parce que la comédie et ses personnages étaient attachants, la violence de leurs destins (des deux côtés du barrage de Naplouse) apparaît d'autant plus scandaleuse. (le monde)


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